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25 septembre 2013 3 25 /09 /septembre /2013 17:40

 

Note de concordance : 8,5/10

 

On ressort les cravates, on taille les costards. L'acier et le cuivre vont chauffer. D'un côté, Tyler Cross, un gangster à la classe naturelle qui se retrouve bloqué dans le pire trou du Texas. De l'autre, le collectif soul/funk instrumental Menahan Street Band dont les rythmiques au cordeau enflamment les productions du label Daptone Records depuis une dizaine d'années sous diverses identités (on les retrouve  parsemés chez les excitants Charles Bradley, Lee Fields, The Dap-Kings, The Budos Band, entre autres).

 

                       

 

 

A la vue des traits angulaires de notre badass et des ambiances 50's offertes par le prodigieux dessinateur Brüno, on aurait pu diriger la Bande Originale de ce Livre vers les irruptions surf-music de Dick Dale (mais son "Misirlou" appartient maintenant à tout jamais à "Pulp fiction") ou encore la partition d'Elmer Bernstein pour le film "The man with the golden arm" (mais c'est pas du jeu d'utiliser une B.O.F. préexistante !).

                                            

 

La tentative de lecture avec "The crossing", deuxième album du groupe purement brooklynois mené par le producteur Thomas Brenneck, s'est immédiatement avérée payante. Cash. Dès la première page, le mariage en grandes pompes de la trompette et du saxophone, les orgues chauds comme la nuit dans un bouge, et le groove posé, sûr de lui, marquaient le pas du criminel à la gueule d'amour.

 

                                   

 

Et que ce soit le disque ou la BD, on y trouve derrière des artistes qui ne sont ni dans le pastiche, ni dans la parodie, ni dans le calque, mais dans l'hommage humble et la renaissance d'un genre : la soul vintage / le polar hardboiled.

 

Bref. Trop long. On n'est pas là pour badiner. Tyler Cross ne fait pas dans le détail, mais dans l'efficacité. Alors on revoit le plan point par point.

 

 

"The Crossing"

Chanson-titre dont l'élégance n'a d'égale que l'allure de Cross, chapeau Fedora surlignant ses yeux perçants - l'archétype du héros de roman hardboiled, comme on connaît Parker. Une tranquillité émane de ce morceau aux boucles de guitare délicates fascinantes. L'assurance et la distinction de notre héros s'y retrouvent. Les mafieux et malfrats grossiers qu'il croisera n'auront jamais ce truc en + qui le rend félin. Ou reptilien.

 

"Lights out"

On passe aux choses sérieuses. Le rythme monte, entre la tension avant un braquage et l'adrénaline qui jaillit comme une bastos. Voir Tyler et son équipe se lancer dans une fusillade d'ouverture d'anthologie, en pleine nuit, dans la poussière du désert texan, en écoutant les attaques mariachis de trompettes trépaner les contretemps fait trépigner.

D'autres éclats de violence jouissifs s'empareront de ce morceau.

 

                    

 

 

"Keep coming back"

Avec son orgue vintage en diable et sa rythmique soul 50's qui fait claquer les doigts, ce morceau convient aux moments d'accalmie, l'heure où s'évapore la fumée des canons. La panne de voiture qui oblige Tyler à traverser le désert pour atteindre une station-service miteuse s'y prête bien. Le son blanc des trompettes crame autant la peau que l'implacable soleil immaculé accablant le fugitif sur ces pages sublimes, aux mises en scènes très cinématographiques. L'hommage sensible aux films de gangsters des années 30 et 50 est affirmé et sincère, les clins d'oeils pléthores, de James Cagney à Humphrey Bogart, de John Sturges à Billy Wilder.

 

 

 

"Three faces"

Un titre plaintif qui poursuit tout à fait l'entame du morceau précédent, appuyant la lassitude de Tyler Cross, coincé dans un bled malsain, bouffé par le pétrole, rongé par la corruption, pourri par une famille de dégénérés détenant toutes les clefs de la ville. Puis la batterie du Menahan Street Band part en voyage, en Ethiopie ou à Cuba, loin de cette triste terre... pour y revenir, inévitablement. Un rêve accroché aux barreaux moisis de la geôle locale.

Ces trois visages sont aussi ceux d'un père tout-puissant et de ses deux fils humiliant et souillant leur belle-fille/belle-soeur la veille de son mariage. La mariée était en jaune. Terrible scène que viennent tremper ces notes épicées.

La vengeance et le chaos macèrent dans ce morceau, avant l'explosion...

 

"Sleight of hand"

C'est une trompette qui dérape, des dissonances qui viennent éperonner le groove pour mieux le faire sauter. Ce sont des notes serrées, qui s'échappent plus qu'elles ne sortent. C'est une batterie qui fait grimper le suspense, qui installe l'action. Tel le serpent qu'il va croiser - géniale idée du scénariste Nury d'en faire un narrateur - Cross a la colère froide. Il ne s'emballe pas, il ne s'énerve pas. Il frappe juste. Comme le Menahan Street Band. Les scènes d'action au graphisme épuré, violent, teigneux, cognant, gagnent encore miraculeusement en puissance avec "Sleight of hand". C'en est presque trop beau, presque trop fort !

 

"Everyday a dream"

On élimine. Gentil morceau, mais trop tendre pour être utile au programme.

 

"Seven is the wind"

La guitare slidée façon western qui tend un horizon à ce morceau soulève les mêmes lassitudes poussiéreuses que le héros solitaire. Bloqué chez les bouseux avec 21 dollars en poche quand on a 17 kilos de came dans son sac, ça irrite.

 

"Bullet for the bagman"

Avec un intitulé pareil, ça ne pouvait que coller. Coller comme une chemise pleine de sang.

 

"Driftwood"

Une virée au far west. Idéal pour illustrer le flashback d'un vieux garagiste touchant qui nous conte l'histoire de ses terres trahies. Les cuivres font alternativement revivre le sifflet des trains à vapeur, ou souffler le vent qui balaie la frontière mexicaine toute proche. 

 

"Ivory and blue" et sa reprise

On frôle la même sanction que "Everyday a dream". Les accents mexicains et les guitares wah-wah posent toutefois une ambiance pour les dialogues percutants de Fabien Nury et son humour noir qui fait bang.

 

                                 

 

 

On résume : ça chauffe du côté de la musique, ça brûle chez ces auteurs passionnés de film noir.

L'extatique funk exotique des brooklynois cool de source.

L'épure ronde et stylisée de Brüno s'est dotée d'un impact + cinglant que jamais, suivant des découpages jamais léchés au hasard qui font chavirer les pupilles. 

 

Il vous faut quoi de + pour vous ruer sur ces deux oeuvres ? Un flingue sur la tempe ?

 

 

En attendant un Tyler Cross tome 2 qui aura pour décor la Louisiane (!), et qu'on découvrira peut-être comme celui-ci en avant-première sur Professeur Cyclope, voici un petit trailer fidèle à l'ambiance :

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